Assurons nos vieux jours ! Tribune de Hervé Mariton signée par 20 parlementaires

 
Nous, parlementaires de la droite et du centre, déplorons l’absence d’anticipation et de stratégie en matière de prise en charge de nos ainés en France. Entrainant de facto les Français, et leur avenir, dans cet immobilisme. A l’approche du lundi de Pentecôte, dont le rendement est consacré à nos ainés depuis la décision audacieuse de Jean-Pierre Raffarin, il est temps de regarder la réalité en face.
 
Cette réalité est double.
 
Avec près de 30 milliards d’euros assumés par la puissance publique, la France est l’un des pays au monde qui consacre le plus pour la prise en charge de ses anciens. Cette dépense publique est croissante. Et sera amenée à croître encore davantage avec le vieillissement de notre population. Or ni l’Etat, ni la sécurité sociale ne pourront assumer une telle croissance. Ni les départements, qui doivent faire face à une dépense d’allocation personnalisée d’autonomie exponentielle. La France compte aujourd’hui 1,5 millions de personnes âgées dépendantes. Elles seront 3 millions en 2060. Les baby boomer d’après-guerre auront 80 ans en 2025. C’est suffisamment simple à anticiper pour que personne ne puisse dire qu’il ne le savait pas !
 
En dépit de cet effort public, la qualité de la prise en charge de nos ainés n’est pas satisfaisante. Beaucoup de Français sont confrontés chaque jour à des drames familiaux qui suscitent chez eux des colères très légitimes : par manque d’aide, la personne âgée dépendante, seule après le décès du conjoint, doit quitter la maison familiale pour rejoindre un établissement qui n’est pas toujours proche. Il en résulte un fort reste à charge (1 500€ / mois en moyenne), les enfants participent financièrement quand ils le peuvent mais sont parfois contraints de vendre la maison familiale.
 
Soyons lucides, la France n’offre pas de conditions de vie décentes à ses aînés. Les solidarités familiales se distendent. Les aidants familiaux assument des situations éprouvantes. Or nos ainés sont nos racines. A l’heure de la République commémorative exacerbée, nous ne savons pourtant plus nous occuper comme il se doit de nos parents encore en vie. A l’évidence, nous ne lutterons pas contre certaines évolutions sociétales de fond. Même si les coups de butoir de la gauche contre la cellule familiale et le rôle des aidants familiaux n’arrangent rien.
 
Mais gouverner, c’est prévoir. C’est pourquoi nous proposons un changement profond. Nous voulons passer d’un système qui repose quasi uniquement sur les financements publics et qui couvre sans discernement tous les degrés de dépendance, partielle et lourde, à un système mixte public et privé. Un système où le secteur privé prendrait en charge la dépendance dite partielle (principalement à domicile) tandis que le secteur public serait concentré sur la prise en charge de la dépendance lourde (principalement en établissements). Le secteur public doit être limité à ce pour quoi il est efficace. Quand il ne l’est pas, assumons pleinement le secteur privé !
 
L’objectif est simple. Aider les Français à rester à domicile le plus tard possible grâce à une rente mensuelle ou un capital permettant de financer travaux d’aménagement ou adaptation numérique des appartements. Permettant aussi de prendre en charge les aidants extérieurs, essentiels pour la personne âgée dépendante et par ailleurs gisements d’emplois dans ce contexte de chômage massif. Aider ensuite les Français dans le choix d’un établissement adapté. Il s’agit tout simplement de donner aux Français les moyens de rester maitres de leur avenir.
 
A cet égard, l’assurance privée présente deux avantages. Premièrement, l’Etat économiserait jusqu’à 10 milliards d’euros. Une fraction de cette somme, environ 3 milliards d’euros, serait restituée aux plus modestes pour une aide à la souscription d’assurance privée. L’autre partie, environ 7 milliards d’euros, serait restituée aux Français en baisses d’impôts et de charges. Deuxièmement, la gestion du risque serait mieux anticipée. La concurrence entre les opérateurs est source d’innovation et de diversification de l’offre. La diversité répond aux besoins individuels et collectifs.
 
Nous ne sommes pas dupes. Il nous faudra généraliser la labélisation des contrats proposés, mais aussi aider les plus modestes à les souscrire et bien entendu interdire la sélection médicale. Cela relève pleinement du rôle de régulateur de l’Etat.
 
Nous écartons l’assurance privée obligatoire. Celle-ci doit rester un acte volontaire. Nous écartons aussi l’assurance à fonds intégralement perdus qui fait que, lorsque le risque ne se réalise pas, les primes restent acquises à l’organisme assureur. Un juste milieu doit être trouvé.
 
Nous souhaitons donc des contrats mixtes entre l’épargne et la dépendance, où la dépendance serait une garantie complémentaire ou optionnelle d’une garantie principale d’assurance vie, d’épargne ou de retraite.  Le principe est simple : une cotisation, régulière ou unique à la souscription qui est pour partie épargnée (via un fonds en euros garanti) ; l’autre partie de la cotisation sert à financer une rente ou un capital versé en cas de dépendance. Cette cotisation ne sera pas un surcoût pour les Français, l’économie réalisée sur le système actuel leur étant restituée.
 
Nous voulons ainsi redonner aux Français la liberté de se prémunir contre un risque que la puissance publique ne sait manifestement pas couvrir. Et qu’elle n’aura pas les moyens de couvrir à l’avenir. De grâce, oublions la notion de 5ème risque et autre étatisation de la prise en charge de nos aînés. Les Français ont déjà trop payé, pour des garanties trop maigres !
 

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