Sincérité et constance : les deux antidotes à la crise de confiance politique

On m’a reproché d’être trop critique avec Nicolas Sarkozy et de jouer contre mon propre camp en réagissant à la sortie de son livre où il indique ne plus être favorable à une remise en cause de la loi Taubira instaurant le mariage entre personnes de même sexe. J’ai parlé de « parjure » ; le mot est à la mesure de la crise de confiance qui ne cesse de se creuser entre les citoyens et les responsables politiques.

Ce qui est en cause, c’est la crédibilité de la parole politique : comment peut-on défendre aujourd’hui une position inverse à celle prise solennellement il y a un peu plus d’un an à l’occasion du rassemblement organisé par Sens Commun ? J’avais été agréablement surpris de son engagement à « réécrire de fond en comble » et à abroger la loi Taubira, même s’il était évident que ce positionnement inattendu ne m’était pas favorable pour l’élection à la Présidence de l’UMP. Ma carrière m’important moins que mes convictions, il s’agissait d’une bonne nouvelle pour les valeurs que je défends avec force et constance. Ma déception fut donc amère quand j’ai eu connaissance de son complet revirement.

Comment peut-on espérer convaincre une majorité d’électeurs quand des engagements de cette importance peuvent être reniés ? Quelle est désormais la valeur des promesses s’agissant de la suppression de l’ISF, de la fin des 35h et de la stricte maîtrise de l’immigration ? Comment éviter que nos concitoyens voient autre chose dans le comportement de la classe politique que de l’opportunisme et du cynisme ?

Ces questions sont au cœur de mon engagement politique et de ma candidature à la primaire de la droite et du centre. J’ai toujours été attaché à la sincérité et à la constance des convictions que je défends. Cela a longtemps été considéré comme ringard et naïf et je n’exclus pas que cette fermeté sur les valeurs et les principes m’ait coûté quelques postes ministériels où il est souvent préféré des personnalités plus « malléables ».

Mais les choses sont en train de changer : ce qui était ringard hier devient tendance et recherché aujourd’hui. Les citoyens sont lassés par la communication à outrance, les tête-à-queue incessants sur le plan idéologique et l’insincérité qui se dégage de beaucoup de responsables politiques. Même si je ne partage rien de leurs convictions, force est de reconnaître que le succès de Jérémy Corbyn chez les Travaillistes au Royaume-Uni et la poussée en faveur de Bernie Sanders dans les primaires Démocrates aux Etats-Unis témoignent de cette attente croissante des électeurs pour la constance des convictions.

Non, la vie politique ne doit pas être sans foi ni loi, comme peut le laisser penser la série à succès House of Cards. Je dénonce avec force cette démarche qui place le cynisme et l’opportunisme au sommet de la pyramide des valeurs.

Faire de la politique autrement, renouveler la politique, écouter le message envoyé par les électeurs : les Français en ont assez de ces formules creuses à masquent l’immobilisme.

J’appelle donc l’ensemble des électeurs à canaliser leur colère légitime face à la classe politique et à faire preuve de discernement : qu’ils traquent l’inconstance et l’insincérité dans les paroles publiques, qu’ils analysent la cohérence et la force des propositions qui leur sont faites. Contrairement à ce que prônent les populistes, il n’est pas utile ni opportun de renverser la table, mais l’heure est clairement venue d’exclure de cette table tous ceux qui trahissent leurs convictions.

Hervé Mariton

Ancien Ministre
Député de la Drôme
Candidat aux primaires de la droite et du centre

Tribune dans Ouest-France